15 janvier 2023 – https://www.bvoltaire.fr/Frédéric Sirgant

Après celui des boulangers, des restaurateurs, des artisans et de toutes les TPE et PME-PMI, voici le désarroi des arboriculteurs.

Étranglés, comme eux, par l’inflation stratosphérique de leurs coûts de production : car, pour faire une pomme, il faut de l’engrais, des traitements, du carburant, de la main-d’œuvre, des palettes.

Christophe Belloc, un producteur de fruits de Montauban, de l’Association nationale pommes poires, détaille, au micro d’Europe 1, cette inflation dramatique :

« Le prix du bois pour faire des palettes ou des plateaux a été multiplié par deux. L’électricité par quatre » et « que ce soit les engrais, le gasoil pour les tracteurs, c’est entre 30 et 100 % de plus ! »

Mais le malheur des arboriculteurs est d’être pris en tenaille entre l’inflation d’un côté et les distributeurs de l’autre.

Actuellement, la grande distribution, par la voix des PDG de Lidl, ou de Leclerc et d’Intermarché, se présente comme la grande alliée du consommateur en mettant en scène sa lutte contre les augmentations demandées par l’industrie agroalimentaire, contrainte de répercuter ses coûts pour survivre.

Ces grands philanthropes oublient de préciser qu’ils contribuent à la ruine des producteurs en leur imposant des prix d’achat qui les obligent à vendre à perte.

Ce samedi, les arboriculteurs se sont mobilisés pour crier leur désespoir et attirer l’attention du gouvernement. Dans le Tarn-et-Garonne comme dans le Vaucluse, grands départements producteurs de fruits, les constats sont les mêmes et les images spectaculaires : les arboriculteurs sont contraints d’arracher des vergers entiers, désormais non rentables.

Opération d’arrachages de pommiers dans le Tarn-et-Garonne pour réclamer une hausse du prix de vente de 20 centimes par kilo pic.twitter.com/CZAOegUu5I — BFMTV (@BFMTV) January 14, 2023

La revendication des arboriculteurs pour survivre est simple : 20 centimes de plus le kilo, comme l’explique Françoise Roche, cette arboricultrice de Moissac, à France 3, qui pointe l’autre gros problème des fruits français, la concurrence étrangère déloyale :

« Des pays comme la Pologne ou l’Italie sont capables de produire beaucoup moins cher que nous avec des conditions sociales bien plus dégradées qu’en France, des conditions de production qui n’ont rien à voir avec la France. »

Pour le moment le gouvernement semble aux abonnés absents. Sur Twitter, le député RN Grégoire de Fournas, lui-même viticulteur, n’a pas manqué de rappeler le rôle de la concurrence étrangère :

Si des producteurs arrachent leurs vergers c’est aussi à cause de la concurrence étrangère. Lors de l’examen de la loi #Descrozaille, je défendrai le localisme et la protection de notre agriculture face à la concurrence étrangère. https://t.co/gUQ8JcUZbA — Grégoire de Fournas (@gdefournas) January 14, 2023

Ces arrachages de vergers entiers sont une nouvelle manifestation du déclin français et d’une crise économique et sociale qui s’annonce dévastatrice : l’arboriculture française a perdu 40 % de ses vergers en vingt ans ! L’équivalent de la surface de quarante terrains de foot tous les mois…

Tous les mois en France, l’équivalent de 40 terrains de foot de vergers sont arrachés. Jusqu’à disparition complète du verger français ? #paietonproducteur pic.twitter.com/ygA0cLIMT1 — CSFL (@csfldefrance) January 14, 2023

Dans ce secteur comme dans les autres, la crise actuelle ne fait que souligner les graves erreurs économiques de ces vingt ou trente dernières années. Il faut souhaiter que ces images chocs réveillent enfin consommateurs, grande distribution et gouvernement.

1er tronçonnage dans les vergers des Alpes. Des productions de pommes reconnues pour leur qualité, qui vont disparaître demain si aucun changement des pratiques de la grande distribution. + #20centimes #paietonproducteur pic.twitter.com/gIX8H6NMRm — CSFL (@csfldefrance) January 14, 2023

Colette : Triste situation pour nos artisans de quelque métier qu’il soit. Il faut que les politiques réagissent avant que la France ne soit totalement détruite de toute part. Il y a un projet de loi qui va être présenté par le député Frédéric Descrozaille (Renaissance) et qui, si il est adopté, ce qui paraît plus que probable d’après les économistes, risque d’appauvrir un peu plus les Français, puisque les augmentations pourront aller de 30 à 50 % à partir de mars 2023. Voilà ce qui se dit sur cette proposition :

« Scandale » inflationniste ou mesure nécessaire pour préserver les entreprises? Une proposition de loi, qui veut changer le rapport de force dans les négociations commerciales, divise la grande distribution et les grands industriels du secteur agroalimentaire. Il y a 4 articles dans cette proposition de loi mais c’est le troisième article qui a mis le feu aux poudres: ce dernier propose de donner plus de poids aux fabricants de produits alimentaires lors des négociations commerciales avec la grande distribution. Frédéric Descrozaille explique vouloir rééquilibrer un « rapport de force structurellement défavorable aux fournisseurs » dans ces discussions « féroces » entre les deux parties.

M. Decrozaille dit vouloir protéger les petites entreprises de l’agroalimentaire, mais cette mesure profitera seulement aux grands industriels et exit des consommateurs. Triste année en perspective !